L'écologie en mode de vie

Publié le par Florence Amalou

 
ivre autrement n'est plus le rêve de quelques babas cool et des seuls militants écologiques. Une part croissante de la population française s'alimente, s'habille, entretient sa forme et sa beauté, sa maison et son jardin en se souciant, davantage qu'avant, du bien-être de l'espèce humaine et de la préservation de la nature. Le succès du 19e salon Vivre autrement, au Parc floral de Paris, du vendredi 17 au lundi 20 mars, en témoigne : le nombre de visiteurs (31 000 en 2005) a doublé en cinq ans.
D'après le sociologue Michel Maffesoli, professeur à la Sorbonne et directeur du Centre d'études sur l'actuel et le quotidien (CEAQ), ce succès s'explique par la mutation de nos valeurs sociétales : "Depuis le début des années 1970, une nouvelle relation à la nature s'installe, nous ne la percevons plus comme un corps mort à exploiter." Cet état d'esprit populaire, qu'on ne retrouve dans aucun programme politique ni aucune structure organisée, se mesure à l'essor de la consommation bio, aux préoccupations de santé (toxicité des produits courants, obésité), et à la recherche d'un commerce plus équitable au niveau mondial.

En 2005, plus d'un Français sur deux a consommé des produits bio (un quart au moins une fois par semaine), alors qu'ils n'étaient que 37 % deux ans auparavant, selon le baromètre CSA-Agence bio 2005. Même si les fruits et légumes restent avec les oeufs les premiers produits achetés, depuis un an les gammes se sont étendues en même temps que les réseaux de distribution spécialisés se sont développés. Le réseau Biocoop (256 magasins) a par exemple ouvert 35 commerces en 2005 et en prévoit 40 nouveaux cette année. La raison ? Les produits courants écologiquement compatibles séduisent de plus en plus d'acheteurs, en dépit des prix qui restent en moyenne un tiers plus élevés. Chez Biocoop, dans les magasins Naturalia ou Monoprix, des produits naturels - c'est-à-dire fabriqués sans pétrochimie ni parfum artificiel par exemple - d'entretien de la maison, du linge ou de soin du corps jouxtent désormais les pâtes, huiles d'olive, camembert ou steaks hachés labélisés AB (un sigle contrôlé par l'Etat).

La clientèle aussi s'est élargie. Si les principaux acheteurs restent plutôt des femmes urbaines d'âge mûr, "beaucoup de couples de 30-35 ans se mettent aux produits écologiques quand arrive le premier enfant", constate Barbara Bobon, directrice du marketing de Biocoop. La progression des ventes (+ 28 % en 2005) des marques Léa Nature, leader français de la cosmétique naturelle, des produits d'épicerie Jardin bio (+ 30 %) et Jardin bio équitable (+ 40 %) attestent de l'intérêt renforcé pour des produits sains et naturels. Cette démarche concerne tous les aspects de la vie.

Il s'agit par exemple de choisir des matériaux écologiques pour construire sa maison et se chauffer - 250 000 m2 de capteurs solaires ont été installés depuis 1999, dont 100 000 m2 l'an dernier, selon le nouveau magazine Habitat naturel - mais aussi de prendre soin de sa santé, différemment. Dans les 63 magasins Nature & Découverte, l'un des plus gros vendeurs d'huiles essentielles, les ventes de produits de bien-être ont augmenté de 20 % en deux ans : "Les clients veulent plus de naturalité et de transparence, mais ce n'est pas toujours facile de trouver des fournisseurs qui peuvent répondre à cette forte demande", dit Françoise Vernet, directrice du marketing de Nature & Découverte.

Récemment, Greenpeace et WWF, certains scientifiques et des personnalités comme Nicolas Hulot (et son Défi pour la Terre) ont affirmé que le corps de l'homme accumule, au fil des générations, des toxiques (produits courants, pesticides, médicaments...). Ces campagnes ont marqué les esprits. Aussi les Français cherchent-t-ils désormais de nouvelles approches en complément ou en marge d'une médication allopathique conventionnelle. "40 % de ma clientèle n'a plus de médecin, explique l'ostéopathe énergéticien Patrick Hoor, installé à Nantes depuis quinze ans. Les gens en ont marre de prendre des médicaments inutiles, voire dangereux, qui ne traitent que les symptômes. Ils viennent me voir une fois par trimestre et je leur propose un traitement préventif à base de médecines douces (ostéopathie, diététique, phyto-aromathérapie et homéopathie). Je prends en compte l'aspect physiologique, organique et psychique de la personne, en fonction des différentes saisons chinoises." A sa modeste mesure, le petit commerce de Corinne Bullat, créatrice d'Happyterrehappy en mai 2005, fleurit gentiment. Cette décoratrice qui travaille à la conception d'espaces de vie écologiques et sains, notamment pour soulager les enfants allergiques, s'est fait une spécialité de la traque de la pollution de l'air intérieur. "Les gens commencent à faire attention à ne plus utiliser de peintures avec solvants, ils choisissent différemment leurs revêtements de sol et maintenant on s'attaque au mobilier à cause du formaldéhyde que certains meubles libèrent", dit-elle.

Côté vêtements, une nouvelle génération de diplômés de grandes écoles de commerce mettent leurs connaissances marketing et commerciales au service de la promotion de la filière de coton bio-équitable. En marge des géants comme La Redoute ou Monoprix, les concepteurs des marques de vêtements Seyes, Idéo, Tudo Bom ?, vendent sur des sites Internet sophistiqués au design coloré et moderne, des vêtements issus du commerce équitable. Pour eux, le prix n'est pas tout, même si c'est encore un frein au développement massif de cette alterconsommation. "En tant que RMiste, j'ai du mal à acheter du jus d'orange équitable, dont le prix est deux fois supérieur, mais, quand je peux, je le fais, explique Stéphane Martin, cofondateur de la marque Seyes, qui tient à fabriquer en France où le secteur textile perd 15 000 emplois par an. Avec nos pulls (entre 75 et 80 euros), c'est la même chose. A cause de H & M., on croit qu'un pull vaut 10 euros, mais pour sortir ce prix, la matière est de mauvaise qualité et il faut rogner sur les salaires en imposant des conditions de travail impossibles", affirme-t-il... Ce que lui comme beaucoup de jeunes, dit-il, n'acceptent plus.


 
L'écologie en mode de vie
LE MONDE | 20.03.06
© Le Monde.fr

 

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Publié dans Parents au naturel !

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I
c'est ce que j'aime chez toi ... j'apprend toujours plein de trucs !!!
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